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Soft skills, miroir aux alouette

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    contact083742
  • 27 juin
  • 3 min de lecture

Oui, je vais encore me plaindre. Je manque de la soft skill de prise de recul bienveillante.... Mais depuis quelques années, les soft skills sont devenues les nouvelles coqueluches du monde du travail. Encensées par les RH, normées par l’AFNOR, objets de multiples formations et évaluations, elles semblent être la clé magique de la performance au travail. Mais que disent-elles réellement sur le travail, les organisations… et les travailleur·euses ?

Extrait d'un document de France Stratégie sur les soft skills. Simple, non ?
Extrait d'un document de France Stratégie sur les soft skills. Simple, non ?

Un engouement massif… mais pour quoi exactement ?

Rapports de France Stratégie, normes AFNOR, discours d’écoles de commerce ou de cabinets de conseil : les soft skills sont partout. Dans le recrutement, la conduite du changement, les plans de transformation, elles deviennent un critère d’évaluation à part entière. Et les conséquences sont très concrètes : accès ou non à une promotion, impact sur la rémunération, stigmatisation des profils « non adaptés », voire pathologisation de comportements pourtant liés à des réalités organisationnelles.


Deux visions concurrentes, un même flou

Le terme recouvre un spectre très large. D’un côté, une vision « individuelle » : des traits personnels, des capacités émotionnelles ou comportementales qu’on pourrait développer (ou pas). De l’autre, une vision « organisationnelle » : les soft skills comme réponse à des besoins pratiques ou à des manques de l’organisation.

Mais la confusion règne. Une direction parle de soft skills, mais fait-elle référence à des compétences transférables (animer une réunion) ou à des traits subjectifs (savoir rester zen dans le chaos) ? Entre compétences que l'on peut apprendre et caractéristiques psychologiques réputées figées, la frontière est floue. Et souvent instrumentalisée.


Un outil de management qui déplace les problèmes

Il est tentant de valoriser l’« agilité », la « résilience », ou la « capacité à agir dans l’incertitude »… quand l’entreprise ne sait pas où elle va. De transformer une absence de stratégie ou de moyens... en qualité personnelle attendue.

Ce glissement permet de ne pas interroger l’organisation. Plutôt que d’adapter le travail à l’humain, on prescrit des attitudes. Plutôt que de penser collectivement les contraintes, on évalue les individus. Cela renforce une forme de clivage culturel entre direction et terrain, et rend les travailleur·euses responsables des limites du système.


Les sciences humaines, empêcheuses de soft-skiller en rond

Face à cette rationalisation des paradoxes, les sciences humaines rappellent que l’éthique professionnelle, le genre des métiers, les dimensions collectives du travail ne se réduisent pas à des traits de caractère. Aucun « trait individuel » ne pourra rendre compte d’une maltraitance institutionnelle dans les métiers du soin. Aucun test ne pourra évaluer la part invisible d’un conflit de valeurs au travail.

La prescription d’attitudes (sois ouvert·e, sois bienveillant·e, gère ton stress) se heurte à la réalité du travail concret. Et à la question : dans quel cadre évalue-t-on ces comportements ? Pour quoi faire ? Avec quelle légitimité ?


Pour un état de l’art critique

Il est temps d’objectiver ce que recouvrent réellement les soft skills en entreprise. Quelles théories sont mobilisées ? Quels dispositifs d’évaluation ? Quelle validité scientifique ? Quelles conséquences concrètes sur les parcours professionnels ?

Il faut aussi repositionner ces évaluations dans les systèmes RH existants : sont-elles liées à des plans de formation ? À des politiques de santé au travail ? Sont-elles transparentes pour les salariés ?

Et surtout, il faut revenir au terrain. Analyser en quoi certaines soft skills répondent à un besoin opérationnel réel… ou masquent une incapacité de l’organisation à prendre soin du travail. Car évaluer un technicien de maintenance sur sa « vision holistique » sans changer son périmètre réel d’action, c’est se payer de mots.


Et je n'ai plus assez de la soft skill patience, quand j'entends de telles horreurs.

Et vous ?




 
 

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